Carlos Hercule, l’épris de Justice

Actuel Ministre de la justice et de la sécurité publique, installé dans ses fonctions le 12 juin 2024, Maître Carlos Hercule a, sans contredit, la ‘’gueule du poste’’. Qui plus est, cette affirmation est d’autant plus vérifiable que le licencié de l’Ecole de Droit et des Sciences Economiques des Gonaïves (1996) avait travaillé, 2005-2006, sur le Décret portant réorganisation du Ministère de la justice et de la sécurité publique (MJSP). Autant dire que l’étiquette de néophyte en terre étrangère siérait mal à Carlos Hercule, à qui voudrait, par médisance ou par cynisme, la lui coller. Certes, les nombreuses expériences de l’Avocat au sein du système judiciaire prédisent peu ou prou sa réussite dans cette quasi nouvelle aventure. Mais, compte tenu de l’état de pourrissement de l’appareil judiciaire haïtien, même doté de la force d’Hercule, le doute est légitime quant aux chances de Carlos d’y apporter remède en un temps record.

En terme d’acquis expérientiels lui conférant une autorité certaine dans le milieu judicaire, soulignons d’entrée de jeu que le nouveau titulaire du MJSP a occupé le poste de Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Port-au-Prince et de Président de la Fédération des Barreaux d’Haïti durant deux mandats, soit pendant quatre années de 2011 à 2015. Qui ne se souvient pas, qu’en bon gardien du Temple de Thémis, Maître Carlos Hercule était monté plus d’une fois au créneau pour dénoncer, lancer des ultimatums…, protester contre les dérives judiciaires, les décisions arbitraires ou inconstitutionnelles de l’Administration Martelly. « Bâtonnier de Port-au-Prince, durant ses deux mandats, des changements notoires ont été apportés au niveau de ce Barreau. La réorganisation de l’Ecole du Barreau par la création du Certificat de Formation Professionnelle Initiale (CFPI) ; l’organisation du stage : la formation continue obligatoire ; l’adoption du Code de déontologie ; la publication de la liste générale des avocats après plus d’une décennie d’interruption ; l’informatisation de l’Administration du Barreau et autres. Sur son premier bâtonnat, les Honneurs du jubilé ont été décernés en faveur de dix-sept (17) avocats septuagénaires, sexagénaires et quinquagénaires de la profession. Et lors de son second mandat, la distinction Officier de l’Ordre de Mérite Juridique professionnel a été décernée à d’anciens bâtonniers et à des avocats qui ont enrichi le patrimoine juridique de leurs ouvrages », vante son Curriculum Vitae.
De plus, Carlos Hercule a occupé la Vice-présidence du Conseil Electoral Provisoire qui avait organisé les dernières élections (2016), jugées ‘’acceptables’’ par certains, qualifiées de ‘’bonnes’’ par d’autres. Au CEP dont Léopold Berlanger a été le numéro un, CH était Président du Bureau de Contentieux Electoral National (BCEN). De ce lieu, il a été l’initiateur du Code de déontologie électorale et des Règlements du Contentieux électoral. Ces deux documents, publiés dans le Journal officiel Le Moniteur du 5 mai 2016, ont été adoptés en vue de crédibiliser le processus électoral particulièrement le contentieux électoral par le renforcement des capacités des opérateurs et surtout des juges électoraux…

Etre, connaître, transmettre…

L’on reconnaît indéniablement en Carlos Hercule un homme qui se veut aussi Fort que le glaive, aussi Juste que la balance, deux symboles majeurs de la Justice. Pour preuve, durant sa longue carrière au sein de l’énigmatique système judiciaire haïtien (près d’une trentaine d’années) son nom n’a été mêlé à aucun scandale… public. C’est peut-être un homme qui se met lui-même perpétuellement en état d’arrestation, qui assigne à résidence ses vils désirs, de peur de n’être jugé par d’autres, qui sait. Ce licencié de l’EDSEG a un parcours académique solide, qui semble avoir forgé tant son esprit que son caractère. En effet, sa licence acquise en février 1996, Carlos Hercule a débuté son stage d’avocat au Barreau de Port-au-Prince le 29 mars de la même année. Il a étudié la légistique matérielle au Microprogramme en Droit- légistique à la Faculté de droit de l’Université Laval. Il a suivi le Programme de Formation continue « Mieux légiférer » de la Faculté de droit de l’Université de Genève. Il a bouclé le cycle d’études Master Il en Criminologie du Programme Interdisciplinaire en Sciences Humaines et Sociales de l’UEH.
Me Hercule a suivi la Formation continue en Droits Fondamentaux de l’Université de Nantes, Paris X Nanterre. Il a participé au Séminaire Techniques de Plaidoirie, Barreau du Québec et Université Sherbrooke, Montréal, Canada. Il a une formation en arbitrage et médiation, CMPAP, Paris, France. En 2005, il a suivi le Séminaire sur l’Administration des Tribunaux organisé par la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de Port-au-Prince. S’il est une autre étiquette que Carlos Hercule ne peut porter, c’est bien celle de l’Intellectuel en chaise longue, peu ou pas engagé dans sa Cité. Son Savoir, il l’a transmis tant à l’Université comme Professeur que dans d’autres espaces comme Conférencier. Ainsi, les thèmes liés au secteur judiciaire sur lesquels il intervient sont variés : « Enfants adultérins dans la législation haïtienne», « le droit à la liberté individuelle », « le droit à la liberté d’information », « La notion de sanctions des violations des droits de l’Homme », « La protection des droits de l’Homme dans le système interaméricain », « l’ application des traités internationaux relatifs aux droits de l’Homme dans le système interaméricain par les tribunaux haïtiens », « l’avocat devant le Tribunal criminel », « le contrôle social », « le droit au double degré de juridiction en matière pénale», « l’extradition au regard de la législation haïtienne », « l’intégrité professionnelle » et « l’éthique électorale ».

Et voilà ! Aujourd’hui affublé du costume de Ministre de la justice, Carlos Hercule est en territoire connu. Être en territoire connu n’est aucunement synonyme d’être exempt de faux-pas. Loin s’en faut ! Intégrité et Impartialité, de ces deux vertus le nouveau titulaire du MJSP se propose d’en faire sa boussole. Dans ce contexte de demande accrue de sécurité par la population, Carlos reconnait indubitablement que la tâche à réaliser s’apparente aux Douze travaux d’Hercule. Ainsi, dans son discours d’investiture le 12 juin 2024, l’homme marié et père de six enfants a appelé à la franche collaboration de tous pour un front commun en vue de soulager la souffrance et la misère de la population livrée à elle-même. « Nous devons nous mettre à l’esprit que la justice est un service public, elle doit fonctionner de manière ininterrompue… », a déclaré véhémentement Carlos Hercule qui, à n’en pas douter, mesure l’immensité du devoir à accomplir…

GeorGes E. Allen